samedi 17 mars 2012

Hey, Marine Le Pen ! Le planning famillial, « c’est un refuge »



Nouvelle annonce détonante de Marine Le Pen : exit les IVG dans les hôpitaux si la candidate est élue aux élections présidentielles. La chef de fil frontiste considère cette pratique médicale comme « un avortement de confort ».  Mais est-ce un confort de frapper à la porte d’un établissement lorsqu’on est perdue ?



Avoir une vie sexuelle épanouie n’est pas simple. On a tous des doutes. On est tous concernés par des contraintes. Les mœurs évoluent mais le sexe reste un sujet tabou. Heureusement, contraception, avortement, sexualité sont des thèmes abordés sans crainte dans les plannings familiaux. Ces centres médicaux informent et prennent en charge tous ceux qui s’y rendent.

Le Mouvement Français pour le Planning Familial

La devise de cette association ? Liberté, égalité, sexualité. En fait, c’est un lieu de parole concernant la sexualité et les relations amoureuses. Son but ? « Que chaque homme et chaque femme, jeune ou adulte, vive dans le partage, le respect et le plaisir », affirme-t-on sur le site internet dédié. Une permanence est proposée le lundi de 14 h à 19 h, le mardi de 11 h à 13 h et le jeudi de 12 h à 15 h. Gratuit et anonyme, le centre permet aux personnes aux faibles revenus d’accéder aux mêmes services que tout le monde.

Qu’en est-il vraiment ?

Pour le savoir, rendez-vous au Planning situé rue Vivienne dans le XIIIème arrondissement de Paris. Sur un plan il est indiqué près de la place de la Bourse. On imagine donc un endroit chic. Mais plus on s’en approche, plus on s’engouffre dans des rues grises aux murs sales et abîmés. Caché dans un immeuble, le centre ne se remarque pas pour celui qui ne le cherche pas. Des escaliers en colimaçon et un couloir étroit mènent à une porte rouge vif. Un contraste dans cet univers obscur. Lorsque la porte émaciée s’ouvre, la différence s’accentue : on découvre  une salle lumineuse et bien organisée.

Midi tapante. Les visiteuses affluent. Face à l’effervescence, le personnel du centre reste d’un calme imperturbable. Eve, 27 ans, est conseillère conjugale. Aujourd’hui elle se charge de l’accueil. Le décor austère de l’extérieur disparait. Il est remplacé par des murs d’un blanc éclatant, « une salle d’attente féministe » avec une documentation foisonnante sur différents thèmes (relations dans un couple, violence conjugale ou encore contraception). L’attente est longue mais l’accueil est chaleureux. Les femmes sont mises en confiance. Ici on est écouté, il n’y a pas « de jugement de valeur ». Aimer sans peur, équilibre du couple, maternité heureuse, sont des slogans affichés de part et d’autre dans la salle.

Un paradoxe s’impose.

On affirme que « la parole est libérée ici ». Le personnel, très accueillant, répond « sans problèmes » aux questions qui lui sont posées. Il met en confiance les femmes mais n’en manifeste aucune envers les journalistes. Lorsqu’il s’agit de poser des questions précises aux visiteuses (les premières concernées) le ton change. La surveillance se renforce pour une raison étrange. «Il faut quelqu’un avec vous pour superviser tout ça», nous dit-on. Est-ce par peur de faire fuir ces femmes un peu perdues ? Aussi StreetGeneration est-il contraint de recueillir les témoignages à l’extérieur du Planning Familial. «On est perdu», confient Alexandre, 17 ans et Violaine, 16 ans. « La seule solution qu’on a trouvée pour savoir ce qu’on doit faire, c’est le Planning», ajoutent-ils. Violaine est enceinte d’Alexandre et n’ose en parler à personne, « surtout pas aux parents ».

On se rend vite compte de l’importance de ces centres. or les difficultés financières sont permanantes. La menace d’une baisse des subventions publiques plane. En 2009, 49 % des financements accordés devaient être retirés en conséquence d’une réforme. C’est pourquoi, le Mouvement Français pour le Planning Familial a gelé les accords avec le gouvernement Manifestations, rassemblements, pétition (200 000 signatures au total) ont porté leurs fruits. Mais cela reste une bataille permanente.

Imaginez la sexualité des filles, des beurettes notamment, dans les banlieues. Elles ont entre 15 et 20 ans. A l'école, il y a des cours d'éducation sexuelle. Mais ils sont mixtes. Souvent, les garçons rigolent. Ils ne craignent pas de tomber enceinte, rares sont ceux qui se préoccupent de contraception. Quand ces filles ont un petit ami, elles voudraient prendre la pilule, discrètement, sans le dire aux parents. A qui en parler ? Aux professeurs ? Difficile. Parfois, l'infirmière scolaire les aide. Mais pas toujours. Et puis, dans les centres d'apprentissage, bien souvent il n'y en a pas. Où aller ? Des études montrent qu'en France, pour quatre filles sur cinq, le premier Planning familial est à 100 kilomètres. Quand elles s'y rendent, elles peuvent se faire repérer par un proche. Parfois, comme dit Jeannette Bougrab, la secrétaire d'Etat à la jeunesse, "elles sont considérées comme des putes", subissent des pressions. Les grands frères. Les voisins. Finalement, beaucoup se retrouvent enceintes. Puis se font avorter. Une galère souvent. Un gynécologue-obstétricien, Israël Nisand, vient de remettre un rapport alarmant au ministre de la santé. 90 000 jeunes femmes de 17 à 25 ans ont subi une IVG en 2010. 12 000 mineures de 15 à 17 ans. Il parle d'"irresponsabilité collective", de "sujet tabou", de "dispositifs inappliqués". Il appelle les laboratoires pharmaceutiques et la Sécurité sociale à joindre leurs efforts pour rendre la pilule gratuite. Il conseille la généralisation d'un "forfait contraception" anonyme pour toutes les jeunes filles, même mineures. A ce jour, le ministre Xavier Bertrand ne veut "rien entendre", dit Nisand. Pourtant, il faudra bien qu'un jour les vieux politiciens l'acceptent : les jeunes voudraient baiser tranquillement.

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